Un barrage et sa retenue, comme de nombreuses autres activités humaines, sont partie intégrante de leur environnement, qu’ils influencent et transforment de façon variable d’un projet à l’autre. Souvent considérés comme contradictoires, sans être nécessairement incompatibles, barrage et environnement sont liés par un mécanisme très complexe, qui rend difficile la tâche de l’ingénieur de barrage. Il lui faut trouver le juste milieu, en harmonisant des besoins différents, et parfois antagonistes.
Nous avons besoin des barrages et des bienfaits que leurs retenues apportent par le stockage de l’eau en période d’abondance et la fourniture en période de carence. Les barrages maîtrisent les crues dévastatrices et les sécheresses catastrophiques. Ils réalisent la régulation des débits naturels, variables selon les saisons et les aléas climatiques, en les adaptant à la demande en eau pour l’irrigation, I’hydroélectricité, l’eau potable et industrielle, et la navigation. Ils favorisent loisirs, tourisme, pêche et pisciculture, et peuvent améliorer parfois les conditions environnementales. Ainsi, les barrages-réservoirs sont devenus une partie intégrante de l’infrastructure que nous avons construite, de la base de survie que nous avons réalisée. Dans l’avenir, beaucoup de barrages seront à construire pour assurer la bonne gestion des ressources mondiales en eau, limitées, mal réparties, et dans bien des régions dramatiquement insuffisantes.
En contrepartie, nous sommes de plus en plus conscients de la nécessité absolue de protéger et préserver le milieu naturel, qui est le fondement, menacé, de toute vie.
L’évolution récente de l’approche plus raisonnée en matière d’environnement se traduit par la notion de développement durable mis en valeur par les enjeux du Millénaire, avec la déclaration des Nations Unies à New York en septembre 2000.
On peut résumer cette évolution par les grandes dates et évènements suivants :
En ce qui concerne la CIGB/ICOLD, les dates qui peuvent être soulignées pour illustrer son action sont les suivantes :
Dans la charte éditée par la CIGB/ICOLD en 1997, il est également souligné l’aspect social, au sens large du mot "environnement" : les gens, leurs terres, leurs lieux de vie, leur économie leur patrimoine et leurs traditions. L’impact des barrages-réservoirs sur ce milieu-là est inéluctable et évident :
Pour ces raisons, les ingénieurs de barrage se trouvent confrontés aux problèmes inhérents à la transformation du milieu naturel en un milieu favorable aux humains
Dans cette lutte séculaire d’amélioration des conditions de vie d’une population mondiale toujours croissante, l’exploitation nécessaire des ressources naturelles, dont l’eau, ne permet pas de préserver le milieu naturel dans sont état initial
Par contre, il convient de protéger ce milieu de toute agression ou toutes les perturbations qui sont évitables
Il est essentiel de collaborer, de bonne foi, avec la fragilité mais aussi avec le dynamisme propres à la nature, sans surcharger son pouvoir de résilience, son pouvoir d’adaptation à un équilibre qui, quoique nouveau, reste équivalent dans son caractère écologique.
De plus, il convient de s’assurer que les personnes directement touchées par un projet se trouvent, après la construction du barrage, dans une meilleure situation qu’auparavant.
La contribution des concepteurs de barrages à la mise en valeur des ressources en eau repose sur une technologie éprouvée, comme en témoigne la réalisation de plus de 39 000 grands barrages [les " Grands barrages " selon les critères du Registre Mondial de la CIGB sont des barrages d’une hauteur supérieure à 15 m, ainsi que des barrages de 5 à 15 m de hauteur et qui stockent plus de 3 millions de m3 d’eau].
Cette technologie se perfectionne toujours, et les connaissances associées à l’expérience acquise des précédentes réalisations sont en progrès continu, notamment en ce qui concerne les impacts sur l’environnement naturel et social.
Il est devenu impératif que la compétence technique des concepteurs de barrage soit désormais également guidée par la notion de développement durable et qu’une grande sensibilité aux problèmes d’environnement, ainsi qu’aux problèmes humains soit désormais attachée à la réalisation de leurs ouvrages.
Les problèmes liés aux déplacements involontaires de population (souvent des populations fragiles et qui doivent être protégées) sont souvent les plus délicats à résoudre. Ils doivent faire intervenir des spécialistes sociologues et anthropologues. Les coûts relatifs à ces opérations doivent être intégrés à l’ensemble des coûts du projet et dans tous les cas la situation de ces populations pendant et après la construction du barrage doit être significativement améliorée en suivant dans cette démarche les objectifs définis par les Nations Unies dans le cadre de la Déclaration du Millénaire. La publication mentionnée dans le texte complémentaire (Bulletin 146 de la CIGB, rédigée en anglais), fait un point précis de ces questions extrêmement sensibles dès que l’on envisage la construction d’un barrage dans des zones où une population fragile est concernée par cette construction.
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Bien que la Commission Internationale des Grands Barrages (CIGB) se soit surtout occupée au départ de la sécurité des barrages, elle s'est rapidement souciée des questions environnementales. L'environnement fût pour la première fois discuté pendant le congrès de 1973, un an après le sommet de l'environnement de Stockholm organisé par l'ONU. Le premier comité technique dédié aux sujets liés à l'environnement fût créé en 1977 et le premier bulletin technique consacré à ce sujet est sorti en 1981. En 1997, la CIGB publia un document, Rapport sur les barrages et l'environnement, qui formulait des conseils pour l'évaluation et la réduction des impacts ou toutes autres considérations environnementales. Il statue que: «la prise de conscience accrue de la situation environnementale et du danger qu'elle représente est l'une des avancés les plus importantes du 20ème siècle».
Les rivières sont des maillons essentiels du cycle hydrologique. Elles transportent l'eau depuis les bassins avals des rivières jusqu'à l'océan et elles fournissent un habitat naturel pour les poissons et la faune en générale. Nos sociétés et écosystèmes dépendent des rivières pour ces raisons. Les barrages et réservoirs, s'ils sont placés correctement sur une rivière ne modifient en rien sa géométrie naturelle et les relâches fournissent le débit nécessaire pour maintenir la qualité de l'eau. Ces barrages-réservoirs maintiennent quotidiennement le débit correspondant à la consommation locale et régionale et permettent aussi de préserver l'habitat naturel.
Aujourd'hui, les barrages polyvalent sont planifiés, construits et exploités en respectant l'équilibre entre les bienfaits économique et environnementaux. Ce processus se fait avec l'implication des parties prenantes. Les impacts économiques et sociaux des barrages sont pris en compte et atténués. La préservation de l'habitat naturel fait désormais partie du travail de conception des barrages.
La gestion réfléchie de nos cours d'eau est devenue un élément essentiel de la construction nationale. Les barrages et réservoirs permettent de mettre en place une gestion de l'eau intégrée pour que ne pas avoir à assécher les ruisseaux une grande partie du temps. Les objectifs de la gestion intégrée de l'eau au niveau régional du bassin versant sont: